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 (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries

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MessageSujet: (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries   (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries EmptyMar 30 Juin - 18:01


   
remember me

for centuries

   
(fall out boy) ▽ Some legends untold some turn to dust or to gold but you will remember me, remember me for centuries

« N'oublie pas d'aller chercher la cargaison demain matin. Avant l'aurore même. Nous disparaîtrons de Turtleroc à peine aurais-je repris forme humaine. » Le bruit des fers, le cliquettement à mon cou. Le bijou trop grand retiendra ensuite le tigre, une fois la nuit tombée. Le fauve qui se débat déjà sous la peau, qui lacère les viscères, qui déchire l'être. Je soupire, frémis sous la douleur régulière. « Bonne nuit, Sherkan. » Merle a un sourire peiné. Nous sommes deux êtres maudits par l'existence. L'homme de bois incapable de mentir, et l'ancien esclave devenu capitaine et qui doit revêtir la fourrure et la bestialité d'un tigre chaque fois que le soleil se couche. J'ai un air fier. Mon second ne verra pas les émotions qui me transcendent. L'homme de bois m'enferme dans la pièce. Une cachette, un abri des regards. Car peu ont connaissance de la bestialité qui prend le contrôle, quand l'obscurité allume ses lucioles dans sa voûte nocturne. Peu savent combien il peut être dangereux de traîner aux côtés de leur capitaine - et pourtant, ils savent, plus que je ne me doute. Et ils acceptent, avec une loyauté qui frise la démence. Je tire sur le collier de fer. Mauvais souvenirs, qui chaque nuit éclosent sur ma peau. Les cicatrices visibles, les marques au coeur, aux côtes, au dos. Les empreintes d'une autre vie, qui s'est achevée il y a bien longtemps. Je ne suis plus l'enfant que je fus autrefois. Je suis homme et capitaine, mais je ne peux observer mes propres poignets sans que la douleur vive des bracelets de fer enchaînés ne se fasse plus lancinante. Je soupire, m'adosse à un mur. La chaîne est reliée à un énorme tronc - un morceau du mât qui monte jusque sur le pont. Même la bête ne saura défaire ce genre d'attaches. Le soulagement qui s'étiole sous les coups.

Le ciel s'obscurcit et s'enchaîne la magie. Les veines qui se mettent à bouillir. Les os qui s'effritent et se courbent. Le corps qui se braque, se transforme, fond et se reforme. La fourrure qui pousse, les crocs qui font grimacer, les yeux qui se fendent d'iris tranchants. L'homme n'est plus qu'une bête - et cette histoire là recommencera aussi longtemps que la damnation survivra. Les liens de métal font grincer le bois, et les rugissements naissent au coin des babines. Les grondements sauvages, les bonds bestiaux, la faim au ventre. Jusqu'à l'épuisement, le tigre tourne, bête dans une cage de bois. Le fer autour de son cou est serré, pour son propre bien. L'animal finit par se laisser tomber en-dessous de la lucarne. La pièce est plongée dans une semi-obscurité que la lune peint de sa clarté d'astre nocturne. La bête lève ses prunelles verte, oranges, chatoyantes. Le crépuscule est sa saison ; les ombres sont à elle, à cette bête fauve et intrépide, à la gueule béante qui continue de pousser ces ronronnements colossaux. Finalement, la bête s'endort, sa tête majestueuse posée sur ses pattes de devant.

Elle relève les yeux quand, alors que le soleil n'a pas encore dressé ses rayons paresseux, Merle ouvre la porte. Il observe si tout va bien. Comme chaque nuit, rien ne semble différent. Alors il referme la porte - ou croit la refermer. Elle ne cliquète pas, et s'entrouvre. Un fin filet de vent vient chatouiller la truffe du félin qui pousse un nouveau rugissement avant de se rendormir. Il verra plus tard. Mais des éons passent, le cycle du temps et ses minutes qui traînent. Et, durant son sommeil, la forme humaine qui s'impose de nouveau, sans plus de douleurs cette fois. Le collier au cou, comme un vulgaire esclave, il se roule en boule sous la lumière du soleil levant, cet humain aux cheveux ébouriffés, et dont la superbe semble être partie avec les rêves.
Je dors, du sommeil non pas du juste mais du blessé. Ma nudité imposée, car nul félin ne saurait porter chemise, pantalon de lin ou bottes, quand bien même tout cela serait de la meilleure facture, ne m'a jamais gêné. Au contraire, il y a quelque chose de sauvage et d'agréable à se réveiller avec le soleil sur la peau. Je roule sur moi-même, les chaînes formant une mélodie connue.

Et dans mes rêves, les souvenirs se font présents. Le tigre a laissé placé aux réminiscences humaines. Aux résurgences de l'enfance. Aux coups de fouet qui teignent les épaules d'écarlate. Aux larmes de colère, le soir, au point que l'on s'endort avec les yeux humides et les dents serrées. Les poignets incapables de se libérer de ces fers mordants. La rage au coeur. L'ample torse qui se soulève sous les émotions qui voudraient déborder. Les songes qui tournent à l'aigre, et les cauchemars monstrueux qui changent mes anciens tortionnaires en créatures chimériques. Je grimace, encore plongé dans le sommeil, et tourne le dos à la porte. La chair couverte des dessins formés par les souffrances. Les empreintes mordantes des punitions. Elles tirent, ces cicatrices pâles, sur la peau neuve et brune. J'ai un soupir sur les lèvres. Parce que, jusque dans mes songes, mes sens encore félins, jusqu'à la dernière seconde, jusqu'à ce que la lune disparaisse, sent une odeur familière, connue. Et ce n'est pas Merle. Un visage qui jaillit sous les paupières. Féminin. Doux. Rassurant. Qui apaise jusqu'à la dernière goutte de mes hallucinations rêveuses. J'ouvre les yeux. Les sens en alerte. Suis-je encore en train de dormir ? Est-ce un rêve ? Ma peau se couvre de chair de poule. Je n'ose bouger, toujours roulé en boule sur le sol, sans voir la porte. Je devine une présence. Mais je n'ai plus ni griffes ni crocs, quant à mes armes, elles sont dans ma cabine. Je grimace - la fureur qui transperce l'être. Qui, qui ose venir ? Doucement, je me redresse, et en m'étirant, nullement gêné par ma propre nudité, je me tourne vers la silhouette présente près de la porte, en me levant. Je sens encore sous mes doigts le grain du bois. La gorge sèche. La soif qui s'imprègne. La tête qui tourne. Je plisse les yeux - j'ai du mal à voir, mes yeux doivent s'habituer à la lumière. Je réalise, plus avec mon odorat qu'avec ma vue, d'ailleurs.

Que fait-elle là, par Mêht ? Un grognement involontaire monte de ma gorge. Un grondement purement bestial, qui semble convenir à ma tenue et à mon corps tendu, aux muscles saillants. Un barbare, au regard pétillant, qui hésite entre l'ombre et la clarté, aux reflets moirés. Je l'observe en silence - je n'arrive pas à trouver quoi dire. La magie met toujours du temps à me rendre mes esprits. Au point que j'aurais presque envie de lui sauter dessus. Toutes griffes dehors - mais mes ongles ne sont pas des griffes, et mes dents ne sont que des dents d'ivoire, et non des crocs. Je calme la bête dans mon ventre, j'inspire, je respire, je tente de retrouver mon calme, le souffle perdu. Comme si j'avais couru - comme si j'étais un noyé sortant de la mer. Dans quelques instants, je réaliserais le ridicule de la situation. Pour le moment, je me concentre sur moi - homme, je suis un homme. Et une chose est sûre - son odeur, je la connais, elle est gravée en moi.

 
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MessageSujet: Re: (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries   (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries EmptyMer 1 Juil - 2:12






Sherkan & Moiga


you will shine


Il n’avait fallu qu’un choc, transcendant et irisant la peau d’émeraude pour la réveiller de son sommeil profond. Il avait suffit de peu, un battement de cil, une flamme en émoi, se consumant délicatement à l’intérieur, dansant une valse avec le coeur. L’adrénaline, le danger, la peur. Aussitôt qu’elle avait entendu le nom écorché du navire, ardemment prononcé, son sang n’avait fait qu’un tour dans sa poitrine, ses paupières s’étaient figées, sa peau livide. Ses doigts étaient restés en l’air, gracieusement suspendus au dessus des gemmes scintillantes qu’elle était venue trouver. « Oui, des navires chasseurs qu’il parait, celui parti dans la nuit pour Turtleroc poursuit un trois mats avec une tête de tigre sur une voile noire, c’est pas commun. » Le marchand se racle la gorge, reniflant grossièrement. « Un problème, M’lady ? » La demoiselle se rappelle doucement les décors et silhouettes l’environnant. Elle esquisse un sourire contenu, prend les gemmes et donne son butin au commerçant. Ses pieds foulent les pavés de maladresse, nervosité démente. Son allure se fait plus rapide à mesure qu’elle traverse les dédales de la citadelle d’or, ses rubans glissent de ses cheveux lisses, faisant virevolter sa chevelure désormais libre. Moiga n’arrête pas sa course avant d’être arrivée à hauteur d’une échoppe de produits magiques qu’elle connait bien. Elle jette presque ses pièces gravées sur le comptoir, avant d’attraper un bocal de cendres qu’elle reconnait, et de disparaitre. Jamais elle n’avait fait cela seule. Son regard vogua un instant sur le palais rayonnant à la lueur du premier jour, reflétant les éclats cristallins qu’elle aimait tant contempler. Peut-être que Cinderella ne remarquera même pas son absence, et après tout, chaque fois elle revenait. Une fois à la limite de la ville, dans un coin isolé, elle enfourna sa tête dans sa capeline et recouvra sa robe, succulente de trésors à dissimuler. Son esprit matérialisa l’idée de l’île, à même l’imagination, et lorsque le reflet apparut, le vide l’inonda. Plus de mots, plus de questions. La seule chose qui l’habitait était la furie. Elle trempe sa main tremblante dans le miroir d’abord, avant d’y glisser son corps entier. Le néant, un court instant. Mais est-ce le temps vraiment dans ce trou béant sans fond ? Puis les bruits, les railleries des hommes, les chants des femmes. Elle découvre ses pupilles, les premiers rayons l’aveuglant. Pas d’effet secondaire à priori, mais peut-être sont-ils cachés sous sa cape. Elle n’a pas le temps. Ses souliers piétinent la cendre d’ailes fossilisées, sa silhouette se frêle déjà un chemin entre les maisons, les yeux rivés vers la terre battue. Une cohue de femmes de joie gloussent entre elles, les robes salies et quelques peu défraichies. « La Mandragore, s’il vous plait. » murmure qui foule l’air d’une inquiétude palpable, voix saccadée. Les filles la toisent un instant, puis l’une d’elle désigne d’un doigt une direction. « Méfie toi chérie, tu m'as l'air bien propre et ceux là ne sont pas ceux qui paient le plus. » Moiga fuit en silence, suivant le chemin de la plage, passant devant les bâtisses toutes plus vivantes que les autres, aux apparences bien éloignées de tout ce qu’elle a l’habitude de voir. Les pieds qui s’enfoncent dans le sable, l’odeur des vagues qui arrive bientôt à ses narines. Elle ne lève le menton que pour observer une jambe en bois de chêne, glissant un instant son regard vers le sien, chacun suivant une nébuleuse curieuse. Il se dirige vers la ville, elle, distingue le navire amarré non loin. Les sons se sont étouffés, les ombres éloignées. L’aube se lève. Discrète, sauvage, la peau d’émeraude arrive sur le pont, alors qu’elle ne voit personne à l’horizon. Elle caresse du bout des doigts le bois, les cordes. Son capuchon glisse de son visage, et elle pousse la porte de la cale du capitaine. Des effluves de rhum, de réglisse, de poudre et de papier bruni. Quelques minutes ses yeux vagabondent dans le décor, puis, une porte battante. Du bout des doigts, elle frôle le bois et pousse délicatement. Mirage. Il est là, le capitaine mordant, les paupières closes, les pores de sa peau dévoilés, à même le sol. Moiga se fige en statuette de marbre, perdue par l’incompréhension de ce spectacle macabre. Des fers, des chaînes. Ses membres sont emprisonnés. Son corps se soulève, dos à elle, avant de venir se révéler tout entier, les rétines confrontées. « Par tous les dieux, que vous a-t-on fait Sherkan ? » Ses lèvres sont entrouvertes, comme gelées par une bourrasque de vent glaciale, une tempête comme seule la mer les déchaine. A la vue de son corps nu, elle se rétracte néanmoins, les pommettes rosies et le regard fuyant. Mais c’est son grognement de gorge, râle profond de l’agonie qui la pousse en arrière. Un pas, deux. Le parquet craque sous son poids. La peur enfouie. Brisée.
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MessageSujet: Re: (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries   (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries EmptyMer 1 Juil - 2:33


   
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(fall out boy) ▽ Some legends untold some turn to dust or to gold but you will remember me, remember me for centuries


La voix se coince dans la gorge desséchée. Que fait-elle ici ? Les brumes de l'esprit qui s'échappent, ne me laissent pas le temps de réfléchir. Je secoue la tête, dans un mouvement inhumain, comme pour chasser les songes qui continuent de battre sous mon crâne. J'ai du mal à réaliser où je suis. Je m'approche d'un coin où se trouvent des vêtements. Je l'entends qui s'approche, s'éloigne, non sans s'exclamer d'une voix qui pourrait me faire rire, « Par tous les dieux, que vous a-t-on fait Sherkan ? », mais son inquiétude est réelle. Plus percutante qu'un choc physique. Je prends sur moi pour ne pas grogner de nouveau. Je repousse mes cheveux poisseux de sueur et tout en enfilant un pantalon large ample aux chevilles, de coton noir, je grogne doucement d'une voix encore un peu difficile. « Si vous vouliez me voir nu, il y avait d'autres possibilités, Milady. » J'ai un léger sourire en me tournant vers elle, de toute ma stature. J'ai encore le tigre au bout des doigts, dans ma carrure. Les zébrures ont disparues, mais pas au coeur.

J'en oublierais presque les chaînes qui continuent de m'entraver. Et bien entendu seul Merle a les clés. J'ai presque envie de rire devant cette situation totalement incontrôlée. Je la voix, apeurée. Pour moi. Son angoisse me touche plus que de raison. Papillons au creux de l'estomac. « Ne soyez pas effrayée, je vous en prie. » Le ton qui redevient doucement familier. Je reprend le contrôle de mon corps. Je m'aperçois que je suis affamé. Je suis surpris que Merle ne soit pas encore là - un problème avec la cargaison ? Mais surtout je ne m'explique pas ce que Moiga fiche ici. Elle ne peut pas avoir voyagé avec nous. Comment, pourquoi ? « Je vous explique tout si vous me promettez de me dire comment vous êtes arrivée. Et pourquoi. » Pour me revoir, peut-être. Je m'assois en tailleur à même le sol. La chaîne qui continue de tinter à mon cou me gêne mais au moins ne m'étrangle t-elle plus. J'ai un soupir. Les explications sont difficiles, car elles sont à dérober à ma fierté. « Je ne suis pas ... Les ... Cette mascarade avec les chaînes a une bonne raison d'être. » J'hésite. Je bute sur les mots. Ma superbe est évaporée. Ma fierté se fait tranchante comme des bris de verre. Je détourne mon regard obscur. Mes mains posées sur mes genoux, ma stature voûtée, je semble plus jeune et plus petit que je ne le suis. Mais une colère enflamme mes joues de pourpre et d'écarlate. « Je ne peux sortir la nuit sans être enchaîné. Car l'obscurité me ... » donne l'allure d'un fauve, bête que je suis sous mon masque humain, comme l'a dit cette sorcière, cette enchanteresse, cette démone, « L'obscurité m'a maudit. A chaque tombée de la nuit, je me transforme en tigre. »

La confession aux creux des lèvres. Je lève mes yeux vers elle, comme pour la défier de ne pas me croire. Le tintement des fers est pourtant là. Je soupire encore et m'adosse au mât où je suis attaché. Mon corps entier me fait souffrir, mais je ne dis rien là-dessus. « Vous avez fait un long chemin pour me voir. Je suppose que ce n'est pas pour observer à loisir tout cela » je raille en désignant mon corps à moitié nu. Le haut de mon corps est couleur de caramel, et les muscles roulent sous la peau. Un être sain, aux formes félines. J'ai un léger rictus en penchant ma tête de côté. « Ne vous avais-je pas dit que nous nous reverrions ? Même si j'étais loin de deviner que cela viendrait de vous. Agréable surprise. Vous m'avez manqué aussi. » Le ton moqueur, qui cache une vérité pourtant saillante. Elle n'a pu quitter de trop mes pensées. J'y revenais à chaque fois, comme une mélodie qui hante, comme un sourire qui illumine. Mon estomac gronde en sourdine et je serre les dents. « Je serai ravi de vous offrir un verre de mon meilleur rhum, mais je suis quelque peu entravé. Mon second possède les clés de ces fers. Auriez-vous l'amabilité de me ramener la bouteille qui trône sur mon bureau ? Vous seriez gentille. » Faute de manger, cela me remplira le ventre et finira de me remettre les esprits en place. Mes doigts semblent gonflés, mais c'est une illusion - la lune disparaîtra, et bientôt mes douleurs avec elle. Comme le tigre qui se volatilise dans les airs de l'aube. J'ai un nouveau grognement. Je n'ai envie que de deux choses : un repas chaud, et mon lit. Je suis fourbu, perclus de courbatures. Mes nuits ne sont guère reposantes. Mais la présence de Moiga continue d'attiser ma curiosité, mon attention. Je regrette d'être attaché. J'ai envie de la saisir contre moi, de frôler sa taille. Elle est sur mon territoire. Et je suis le roi ici.


 
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MessageSujet: Re: (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries   (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries EmptyMer 1 Juil - 15:28






Sherkan & Moiga


you will shine


Les frissons qui parcourent la peau, silencieusement, méticuleusement comme un doigté de porcelaine. Une coquille pouvant se briser à la moindre éraflure, ne laisser de traces que des morceaux fendus, éparpillés. Elle pourrait s’effriter, la grenouille. Dans quoi s’est-elle embarquée ? Ses souliers martèlent le bois, à mesure que ses pas mettent de la distance entre eux, d’une délicatesse marquée. Ses hanches viennent se cogner contre la table du capitaine, l’éveillant de son inertie. Elle l’observe attraper un pantalon, avec une impassibilité qui lui échappe. « Si vous vouliez me voir nu, il y avait d'autres possibilités, Milady. » Son sourire enroué s’envole, flotte au dessus de Moiga comme un sarcasme au culot qu’elle voudrait tordre, étouffer. Mais sa silhouette ne fait que se retourner, dans une lamentable tentative de sauver les apparences. Dos à lui, elle entend le tissu frotter sa peau, les chaînes se battre entre elles, tandis qu’elle masse ses joues pour leur insuffler quelque fraicheur encore accrochée à ses doigts, ne parvenant à effacer de son esprit ce qu’elle avait vu. « Ne soyez pas effrayée, je vous en prie. » Son ton se fait plus doux, comme un ronronnement murmuré. Elle plaque une main sur un bras, se retournant lentement, le regard encore discret derrière son épaule, les cils reflétant sa défiance. « Je vous explique tout si vous me promettez de me dire comment vous êtes arrivée. Et pourquoi. » Elle en aurait presque oublié la raison de sa visite impromptue, après une telle scène comme on en voit rarement. « Je pense que vous comme moi savons que l’homme enchaîné doit l’explication en premier. Est-ce une mutinerie de votre équipage ? » La peau d’émeraude s’est avancée sans le réaliser, dans l’embrasure de la porte, toisant de toute sa stature un capitaine désormais assis, le menton relevé pour l’observer. Un soupir se libère de ses lèvres, alors que résonnent les crissements des chaînes. « Je ne suis pas ... Les ... Cette mascarade avec les chaînes a une bonne raison d'être. » Elle a disparue, cette fierté, cette audace qu’il aimait tant brandir et pavaner durant leurs précédentes entrevues. Où était donc passé le fauve qui l’avait hypnotisée, réduite à se morfondre à sa simple présence interdite, à son absence inépuisable. Elle perd ses rétines noires, et cette simple fuite lui assène un coup au coeur. « Je ne peux sortir la nuit sans être enchainé. Car l’obscurité me … L’obscurité m’a maudit. A chaque tombée de la nuit, je me transforme en tigre. » Sa peau opaline aurait presque pu devenir plus blanche encore, alors que ses lèvres se pincent. Elle les humecte simplement, doucement, pour cacher cette violence involontaire et indigne. Ses doigts s’agrippent à sa capeline, se crispent, déforment le tombé du drappé. Les évènements se succédant prenaient un sens désormais. Elle le sentait, elle le savait, la vérité était telle quelle, sans courbette ni révérence. Lui aussi, la magie l’avait maudit. Leurs regards se font de nouveau face, duel silencieux. « Vous avez fait un long chemin pour me voir. Je suppose que ce n'est pas pour observer à loisir tout cela. » Puis de nouveau le jeu qui reprend, les dés sont lancés, les cases s’ouvrent sous leurs pieds. Son humeur est peut-être ce qui le rend le plus humain. Elle laisse ses yeux vagabonder là où il dirige ses mains, avant de se reprendre en entendant son rire mesquin. « Je vois que même dans pareille situation, vous ne perdez pas votre entrain. Mais non, il ne s’agit pas de cela. » dit-elle en lâchant un sourire. « Ne vous avais-je pas dit que nous nous reverrions ? Même si j'étais loin de deviner que cela viendrait de vous. Agréable surprise. Vous m'avez manqué aussi. » Elle roule des yeux, ne répondant que par un soupir léger mais amusé. La mécanique se réchauffant doucement sous les râles. « Je serai ravi de vous offrir un verre de mon meilleur rhum, mais je suis quelque peu entravé. Mon second possède les clés de ces fers. Auriez-vous l'amabilité de me ramener la bouteille qui trône sur mon bureau ? Vous seriez gentille. » Les pirates ne juraient-ils que par le rhum ? Il était bien tôt pour boire, mais après tout, là n’était pas le problème premier. La grenouille dissimule comme elle peut un léger sursaut, et attrape la bouteille entamée sur la table, arrachant le bouchon de ses doigts et grimaçant à la forte odeur inhalée du goulot sous son nez. Ses jambes viennent se glisser contre le bois râpeux, agenouillée à quelques centimètres du prisonnier. Elle lui tend sa récompense et sans un mot, frôle sa capeline pour la faire tomber à ses pieds. Elle évite son regard, devinant que le sien allait se perdre par la raillerie masculine. Ses doigts se glissent dans ses cheveux et récupèrent deux épingles parmi certaines restées accrochées dans les filets châtains. Une chose qu’elle avait apprise, c’est que n’importe quelle serrure pouvait être crochetée par une femme bien munie. Ses mains là étaient habiles et méticuleuses, elle enfourna les aiguilles dans le verrou et se mit à gratter les goupilles dans un sens, puis dans l’autre, recommençant chaque fois que nécessaire. « Gardez vos flatteries pour plus tard, le temps presse. J’ai emprunté un portail pour arriver en hâte vous délivrer un message. Vous êtes en danger, La Mandragore est recherché par un navire chasseur parti cette nuit de Goldenbridge, vous devez partir au plus vite. »
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MessageSujet: Re: (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries   (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries EmptyMer 1 Juil - 16:13


   
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« Je pense que vous comme moi savons que l’homme enchaîné doit l’explication en premier. Est-ce une mutinerie de votre équipage ? » L'idée m'est si ridicule que j'émets un rire. Mon équipage, se rebeller ? Par tous les dieux non. Alors les mots sortent de ma gorge comme des cris de détresse, et sont pourtant chuchotis de l'esprit. La demoiselle semble pâlir de seconde en seconde, et je m'en veux soudain de lui donner ce fardeau. Pourtant, cette vérité agit comme une clé qui déverrouille mes actions. Voilà les raisons qui m'ont poussées à m'enfuir à chaque fois, alors que le soleil ternissait à l'horizon et laissait place à l'astre lunaire. J'ai peur de voir le dégoût dans ses yeux, mais il y a autre chose. Je ne comprend pas - et je déteste cela. Je regagne bien vite mes airs bravaches et fiers, mais elle a vu. Elle a pu apercevoir la faille et je déteste cela. Un homme ne montre pas les fêlures qu'il possède, quand bien même la femme auxquelles il les livre s'en montre digne en tout points. Je ne doute pas que Moiga se révélera muette comme une tombe si besoin est, mais la simple pensée que je puisse perdre son estime à cause de cette vérité m'émeut plus que de raison. « Je vois que même dans pareille situation, vous ne perdez pas votre entrain. Mais non, il ne s’agit pas de cela. » De quoi s'agit-il alors ? J'étais bien entendu assez lucide pour comprendre qu'elle n'était pas venue juste pour voir si j'allais bien. Personne ne fait un tel périple pour une seconde, un coup d'oeil, un rire. Pourtant, en y repensant, j'en serais capable, être passionné de feu et de sable brûlant, à l'esprit aussi têtu et implacable que le vent du désert qui finit par avoir raison de toute chose.

Elle m'offre ma récompense liquide et j'en avale rapidement une gorgée. Je manque de m'étouffer en la voyant s'agenouiller. J'ai le réflexe de vouloir la retenir - car ma première impression n'est pas qu'elle se voûte vers moi, mais qu'elle tombe. Ma main effleure son bras avant que je ne comprenne et mes doigts sont alors loin de sa peau. La proximité soudaine, à laquelle je ne m'attendais pas et sur laquelle je n'ai pas réellement de contrôle me hérisse. J'aime avoir la situation bien en main, et malgré mes mots acides et mes réparties, je ne suis qu'un homme enchaîné et affamé. Je l'observe, médusé, user de ses épingles contre ma serrure. Sans sa cape, elle a l'air plus fine, plus délicate. Plus humaine. Magnifique. La véritable magie est la beauté d'une femme. Et celle de sa langue également, qui peut se révéler acérée comme un couperet. Cette dame là recèle bien des secrets, je songe en papillonnant des cils, l'oreille tendue vers les goupillons qui tintent. « Gardez vos flatteries pour plus tard, le temps presse. J’ai emprunté un portail pour arriver en hâte vous délivrer un message. Vous êtes en danger, La Mandragore est recherché par un navire chasseur parti cette nuit de Goldenbridge, vous devez partir au plus vite. » J'ai écouté d'une oreille distraite, et tout d'abord, je ne fais pas attention. « Où avez-vous appris à faire cela ? » je demande, les yeux fixes sur ses mains qui s'activent. Mon coeur tambourine - quelle sorte de dame connaît les manoeuvres pour ouvrir une serrure ? J'ai un coup d'oeil vers elle, puis le flot de ses paroles fait sens. Mon air admiratif et séducteur fait place à des traits d'une rudesse extrême. Le sérieux d'un homme. « Un navire chasseur ? Merle, je dois avertir Merle ... » Je me redresse, et dans un cliquetis bienvenue, mes chaînes s'ouvrent. Je retire à gestes agacés les fers qui m'entravaient. Je n'ai bu qu'un gorgée du rhum dont je me faisais un plaisir de goûter la saveur, mais à présent, je n'en ai que faire. « Je dois prévenir mes hommes. Ils sont partis chercher des marchandises, et je suppose qu'ils ont eu des problèmes avec les revendeurs. » Je grimace. Toujours torse nu, je pénètre dans ma cabine à grands pas. Mes pieds nus sont aussi discrets que des ombres. Comment contacter Merle ? Je ne peux pas délaisser le navire, ni même laisser Moiga seule ici. Nous n'avons qu'à attendre. J'ai un sourire carnassier. « Que savez-vous de plus ? Ce navire, de quel genre est-ce ? Ont-ils beaucoup d'hommes ? Et les armes de ... »

Je réalise soudain. Cette femme a fait des kilomètres je ne sais comment, et a sûrement encouru des risques énormes pour me prévenir. Debout derrière mon bureau, les mains posées à plat sur une carte, je lève les yeux vers elle. Une lueur sincère de reconnaissance y brille ; des lumières encore inconnues à ce jour dans mon regard. Je fais le tour du meuble et m'approche d'elle. Je me saisis de sa main et m'agenouille. Il n'était pas dit qu'un capitaine pirate mettrait le genou à terre face à un prince ou un roi. Mais face à une femme qui a fait de telles démarches dans le but de m'aider, je n'ai aucune pitié envers moi-même. Les yeux se lèvent vers elle, sérieux. Aucune trace de moquerie. Ma voix est grave et basse, et ressemble à celle qu'un tigre aurait si il avait forme humaine. « Vous nous avez sûrement sauvés grâce à votre avertissement. Nous allons pouvoir faire un détour afin de l'éviter. Je ne vous remercierais jamais assez. » Je dépose un baiser sur le dos de sa main. Non pas un baiser sensuel ou séducteur. C'est le contact léger et chatouilleux d'un homme qui remercie une femme, en lui offrant ce qu'il possède de plus - un pan de sa dignité, un pan de sa liberté. « Ordonnez, et vous aurez. Bijoux, or, tissus. Ce que vous désirez, je vous l'offrirais. Rien ne pourra sûrement racheter cette dette que j'ai envers vous. Mais si je puis vous remercier de quelques façons ... » Je retourne à mon bureau, m'empare d'une plume. Je vais envoyer un corbeau à Merle. L'oiseau est habitué à retrouver mon équipage. J'écris rapidement une missive à grands gestes. Pas de réelle panique - au contraire, une certaine excitation. Si ils ne reviennent pas assez vite, nous devrons nous battre. Mais Moiga, dans tout cela ? « Vous avez fait ce chemin jusqu'ici, grâce à un portail, pour me prévenir ... » Je répète ses mots, semble y réfléchir. « Pourquoi ? » C'est là la question la plus intéressante. Peut-être a t-elle été charmée par mes mots ou mon allure, la dernière fois. Mais rien qui ne la pousse à venir me sauver. Rien qui ne l'oblige envers moi-même. J'émets un sifflement et un oiseau au plumage d'ombre arrive peu après. Le volatile est domestiqué, et j'attache rapidement la lettre à sa patte. Je chuchote à son oreille, trouve Merle, et il s'envole dans un bruit de plumage duveteux. J'attrape une pomme et mord avec avidité dedans. La faim continue de me tenailler et je m'affale dans mon fauteuil de capitaine en grimaçant. Peut-être par souci d'équité, je lui révèle : « La transformation n'est jamais très agréable. Le corps entier qui passe de tigre à homme, c'est ... disons, laborieux. » Je m'étire encore, masse mes bras et mes mains en finissant ma pomme. J'essuie du dos de ma main ma bouche et mes moustaches et j'observe plus en détail la demoiselle. J'ai presque envie de lui révéler ce qui me vient à l'esprit - ainsi debout dans ma cabine, elle ne semble plus une simple femme docile, mais une potentielle sirène des mers, divine et guerrière. J'ai un petit sourire amusé, en revenant à mes habitudes. « Avez-vous songé à ce que je vous ai dit l'autre fois ? Avez-vous décidé de conquérir le monde en ma compagnie ? Ma cabine vous est toujours ouverte.   » Ladite cabine se révélait luxueuse, mais non fastueuse. Tapis épais et moelleux aux pieds, tableaux et objets de grandes valeurs. L'endroit respirait l'idée du confort mais aussi du pratique. Une bibliothèque aux portes  de verre renforcé scellées cachaient des titres de magie que j'avais obtenu à très grand prix. J'étais fier de cet endroit, et plus encore de mon navire tout entier.

 
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MessageSujet: Re: (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries   (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries EmptyMer 1 Juil - 23:21






Sherkan & Moiga


you will shine


La chevelure tombante sur les épaules, frôlant sa peau d’une douce tiédeur, cachant ses yeux si bien qu’elle les ramène en arrière d’un geste de nuque pour avoir les pupilles rivées sur la serrure, l’air plus sérieux que jamais. Ses doigts manient les épingles comme elle manie son fuseau, avec finesse et patience. La concentration est maître. « Où avez-vous appris à faire cela ? » Son esprit divague un instant, vers des souvenirs perdus dans le grand froid. D’aussi loin qu’elle se souvienne, elle avait toujours été habile de ses doigts. Elle avait apprit à tisser, coudre, quand bien même elle était dotée de pattes vertes et visqueuses. Mais surtout, elle s’était sortie des cages rouillées de la sorcière pour récupérer ne serait-ce que des miettes de pain laissées derrière, enfant châtiée. « Disons seulement que j’ai moi aussi été un jour contrainte de briser des fers. » Murmure las et insignifiant, auquel elle ne porte que peu d’attention. Son intérêt ne va qu’envers le Capitaine au Tigre et non à ses propres mémoires, oubliées depuis longtemps. « Un navire chasseur ? Merle, je dois avertir Merle … » Le cliquetis retentit et ses rétines se perdent une seconde sur le buste nu du capitaine, se gonflant à mesure que son palpitant s’agite. « Je dois prévenir mes hommes. Ils sont partis chercher des marchandises, et je suppose qu'ils ont eu des problèmes avec les revendeurs. » Elle l’imite et soulève sa silhouette gracile, le visage dur, trottinant dans ses pas jusque dans la cale. « Que savez-vous de plus ? Ce navire, de quel genre est-ce ? Ont-ils beaucoup d'hommes ? Et les armes de ... » « Rien malheureusement, je ne sais rien de plus. J’écoutais les ragots de simples marchands. Je suis navrée de ne pouvoir fournir plus d’informations. » Un soupir, long et souple échappe à ses minuscules poumons, alors qu’elle entremêle ses doigts de gêne, face à Sherkan qui la dévisage derrière son bureau. Elle réalise soudainement cette folie. Elle a agi sans aucune prise de conscience. La raison l’a abandonnée et la voilà liée au danger, celui ci même qui vogue lentement mais sûrement jusqu’à eux. Aura-t-elle assez de cendres pour repartir ? Le capitaine doit distinguer son embarras, et s’empresse de s’agenouiller face à elle, lui prenant délicatement la main. « Vous nous avez sûrement sauvés grâce à votre avertissement. Nous allons pouvoir faire un détour afin de l'éviter. Je ne vous remercierais jamais assez. » La peau d’émeraude bat des cils à ce toucher, à ce baiser sur sa paume. Bien souvent ce geste courtois lui est offert, entre personnes de noblesse, mais jamais il ne lui avait fait un tel effet. L’apaisement, l’espoir peut-être. Elle boit ses paroles comme une vérité propre, se rassurant de leur avoir évité une bataille à laquelle ils n’étaient pas préparés. « Ordonnez, et vous aurez. Bijoux, or, tissus. Ce que vous désirez, je vous l'offrirais. Rien ne pourra sûrement racheter cette dette que j'ai envers vous. Mais si je puis vous remercier de quelques façons ... » Moiga ne désirait ni pierres ni soieries, pas même quelque mérite. Ce qu’elle souhaitait par dessus tout, c’est que les dieux leur laissent la vie sauve. « Vous m’avez déjà sauvé la vie par le passé, une dette pour une dette, il n’y a rien à payer. » glisse-t-elle doucement, les pupilles lacérées. Le capitaine se relève partir écrire un message, probablement pour regrouper ses hommes. La demoiselle se laisse aller un instant à la contemplation de ce qui l’entoure, faisant lentement virevolter sa robe à mesure qu’elle piétine dans la vaste cale. Du bout des doigts, elle frôle les objets poussiéreux, les livres aux couvertures entaillées, les missives en lambeaux, les trésors marqués encore de l’empreinte d’eau salée. Elle se plait à écouter le bois craquant sous les vagues endormies, à contempler les premiers reflets du jour perçant les vitraux. « Vous avez fait ce chemin jusqu'ici, grâce à un portail, pour me prévenir ... Pourquoi ? » La grenouille fait volte face, confrontant de nouveau cette silhouette galbée, brunie par un soleil brûlant, ses pupilles si sombres et énigmatiques, pouvant passer de la curiosité et l’animosité au sérieux en un rien de temps. « Je ne sais pas moi-même, un instinct peut-être. » Elle réalise l’idiotie de ses paroles, se reprend. « Si j’avais fait la sourde oreille, vous auriez peut-être brisé votre promesse de revenir me trouver. » Elle dessine un sourire, léger, non pas mielleux mais moqueur. Les cartes ne sont pas encore toutes découvertes, et il est toujours plus séduisant de les laisser se dévoiler le moment voulu, à force de jeu. Un sifflement soufflé, épuré, et un oiseau sombre arrive à travers un hublot pour récupérer la lettre du capitaine. « Cette… malédiction… » elle murmure, mâche ses mots, incertaine de prendre la bonne décision en se perdant toute entière dans la gueule du monstre marin. Mais Sherkan la devance, casse ce faux silence par le son de sa mâchoire croquant dans une pomme. « La transformation n'est jamais très agréable. Le corps entier qui passe de tigre à homme, c'est ... disons, laborieux. » Elle écoute, sans plus de mots, n’occupant ses mains que pour venir rattacher ses cheveux grâce aux épingles, la poitrine se gonflant timidement. Elle pouvait se souvenir au millimètre près de sa propre transformation, si lancinante, si douloureuse qu’elle en frissonnerait encore. Lui, revivait cet instant chaque nuit. Infamie, souffrance muette. Elle connaissait si peu de la magie, mais assez pour savoir qu’il fallait sérieusement contrarier une sorcière pour devenir son esclave, son animal. « Avez-vous songé à ce que je vous ai dit l'autre fois ? Avez-vous décidé de conquérir le monde en ma compagnie ? Ma cabine vous est toujours ouverte. » Elle rit, doucement, tendrement, se passant une main contre le bras. « Je ne nie pas que la proposition est tentante, alléchante même. Mais une dame de ma condition sait garder les pieds sur terre quand il le faut. D’ailleurs, je ne serais qu’un fardeau dans une situation dangereuse comme celle-ci. » Elle se tient toujours face à lui, l’oeil étincelant. Son bras remonte lentement jusqu’à son épaule, d’où ses doigts glissent sous le tissu pour venir frôler sa peau d’émeraude, sa peau brûlée. Ruines de sa propre malédiction. Elle avance jusqu’à la petite pièce où se trouvent le mât et les chaînes, pour prendre la poignée dans ses mains, et la refermer. « Il y a longtemps j’ai appris que n’importe quel sortilège peut être brisé… est-ce une sorcière qui vous a maudit ? »
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MessageSujet: Re: (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries   (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries EmptyJeu 2 Juil - 10:55


   
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Je continue d'observer chacun de ses gestes. Ils sont sensés, rapides et adroits. Je sens mon regard se troubler. « Disons seulement que j’ai moi aussi été un jour contrainte de briser des fers. » Quoi ? Le coeur qui manque un battement. Mais déjà mon attention va ailleurs, gravant cependant dans un coin de ma tête cette interrogation - quel genre de fers a t-elle dû briser, cette femme adorable ? Et la colère qui accompagne cette question est aussi brûlante que le sable des dunes d'Agrabah. Je suis à présent libre, et je frotte mes poignets, mon cou. La morsure est ancienne, plus douloureuse dans les souvenirs qu'en réalité, mais ce sont des gestes dotés d'une connotation ancestrale. Un réflexe idiot. Les doigts durs qui rencontrent de vieilles marques, connues et maintes fois caressées avec amertume. Je m'empresse de noyer Moiga de questions. Auxquelles elle semble faire face, totalement perdue. « Rien malheureusement, je ne sais rien de plus. J’écoutais les ragots de simples marchands. Je suis navrée de ne pouvoir fournir plus d’informations. » Nous réalisons à peu près au même moment tout ce que cela signifie. « Ne vous excusez-pas, voyons.  » Je ne puis exactement exprimer clairement mon admiration et ma reconnaissance, mais j'essaye. Une tentative peut-être vaine, mais au-moins aurais-je mis toute mon âme, mon essence même dans les remerciements que je lui présente. « Vous m’avez déjà sauvé la vie par le passé, une dette pour une dette, il n’y a rien à payer. » Mon sourire se fend d'un brin d'amusement, alors que je me redresse, en la suivant de mes yeux fixes, avant de m'éloigner. Une dette pour une dette, oui. Mais est-ce juste cela qu'elle voulait régler, en venant me voir ? Je ne pense pas - je sens qu'il y a autre chose. De plus profondément ancré, entre nous. Comme un arbre aux nombreuses racines et aux ramifications infinies. Du coin de l'oeil je surveille son petit manège, et si j'aurais habituellement grimacé en voyant un intrus toucher mes objets, possessif comme je suis, elle ne me gêne pas. Les femmes qui entrent ici n'ont souvent pas l'occasion de s'attarder sur autre chose que moi-même. Moiga est spéciale - jusqu'à quel point, exactement ? Mes questions éclosent sur mes lèvres. Elle se retourne, dans un mouvement qui fait ondoyer ses vêtements, gracieusement. « Je ne sais pas moi-même, un instinct peut-être. » Les yeux qui pétillent ; un instinct, vraiment ? « Si j’avais fait la sourde oreille, vous auriez peut-être brisé votre promesse de revenir me trouver. » « Il est vrai que mort, j'aurai eu plus de difficultés à vous retrouver, MiLady » je glisse d'un ton amusé.

« Cette… malédiction… » Intelligente créature, à la curiosité vive et agitée. Je nourris ses interrogations muettes, sans pour autant libérer trop d'informations au vol. La raison de ce sort, par exemple - a t-elle réellement besoin de savoir que, après avoir bafoué une sorcière, cette dernière s'est vengée ? Au moins, cet accident m'aura prouvé que je dois me méfier des créatures trop belles pour être réelles. Chose que je ne fais absolument pas avec Moiga - à tête dure, tête dure et demi. Merle, pourtant, m'a fait remarquer il y a peu que mes anciens penchants séducteurs, parfois cruels, s'étaient calmés. Ils avaient trouvés un objectif - la vengeance. Si je me montrais toujours aussi charmeur, ce n'était plus afin de réchauffer le lit de ma cabine, mais pour me sentir vivant, le temps d'une seconde. Son rire à elle me donne cette sensation là, également, alors qu'il s'épanouit dans l'air. « Je ne nie pas que la proposition est tentante, alléchante même. Mais une dame de ma condition sait garder les pieds sur terre quand il le faut. D’ailleurs, je ne serais qu’un fardeau dans une situation dangereuse comme celle-ci. » Je hausse un sourcil - de quoi a t-elle peur ? D'être un poids mort ? Je pourrais lui apprendre à se battre. Lui parler de Talya Blackraven. Mais mes yeux fixent sa main qui va contre son épaule. Geste sans incidence, mais qui me rend curieux. Un mouvement pour s'apaiser peut-être ? Comme lorsque je frotte mes poignets ? Tout à mes questions, je la regarde fermer la porte. Comme on fermerait le mauvais chapitre d'un livre. Cette action qui pourtant n'a rien de symbolique fait frissonner mon coeur. Comme un geste protecteur - quelque chose de doux et de diffus qui me prend au ventre. « Il y a longtemps j’ai appris que n’importe quel sortilège peut être brisé… est-ce une sorcière qui vous a maudit ? » J'avale ma salive et passe ma langue sur mes lèvres. « La magie ne peut être vaincue que par la magie - d'un baiser parfois, ou de l'amour. Mais la malédiction que je traîne ne sera brisée que par la sorcière qui l'a lancé j'en ai peur. On parle aussi de - » j'hésite. Quel mal après tout à parler de mes espoirs ? Seul Merle, qui partage lui aussi le contrepoids d'un sort d'une bonne fée, connaît cette idée folle. « Il y aurait une île qui ne serait qu'une jungle fantastique, gigantesque. Les créatures là-bas serait géantes, et ses dangers multiples. Pourtant, en son écrin de flore hostile se cacherait la réponse à n'importe quel sortilège, malédiction. Un joyau, peut-être, ou une relique magique ... Cette île n'est sur aucune carte, et je ne saurai dire si il s'agit de légendes de pêcheurs ou d'un fait réel. » Je tapote de mes doigts la table de mon bureau, quelque peu agacé par mes propres trous de savoir. C'était tout ce que j'avais réussi à glaner pour le moment. Piètres informations.

« Vous avez dit ... Avoir brisé des fers. Dites m'en plus - avez-vous ... été faites esclave ? » Le ton est d'une douceur extrême. Comme une caresse faite voix. Le statut d'esclave, par les dieux, je connais. Pourtant elle n'a nullement l'air d'une ancienne prisonnière. J'ai du mal à me la figurer fers aux poignets, avec sa gracile stature. J'englobe tout son corps de mon regard, et je n'y vois qu'une femme magnifique bien qu'intrigante. J'ai encore bien des choses à apprendre sur elle, et qui sait ce qu'elle cache sous ses jupons et son crâne fourbi d'idées ?

 
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MessageSujet: Re: (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries   (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries EmptyJeu 2 Juil - 23:39






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Il y a toujours des regrets, de sombres remords qui dansent autour des âmes au fil du temps, telles des lamentations glissantes et résonnantes aux oreilles, aux coeurs même. Des chuchotis las, vagabondant au gré des envies, des peurs les plus enfouies. Leur mélodie semblable à des tambours qu’on entendrait au loin, au delà des vallées. Ces mémoires enterrées, recouvertes de terre moite, qu’on aimerait oublier, mais qui refont surface au travers d’une peau marquée. De fer, de métal, ces sons de cloche macabres. Elle n’aurait soupçonné une telle chose, mais peut-être était-ce une des raisons pour lesquelles ils étaient irrémédiablement attirés l’un l’autre. La magie, vicieuse, dévastatrice. Chacun victime d’un bourreau vêtu de noir, contraint de se battre pour survivre aux caprices d’une chimère. « Il est vrai que mort, j'aurai eu plus de difficultés à vous retrouver, MiLady. » Une virulence extrême l’avait habitée, plus que de raison, loin de toute conscience. Sur le moment, toute trace de jugeote ou de quelque pensée l’avait abandonnée. Elle avait simplement agi, selon ce que son coeur martelant lui avait ordonné. Un soupir, un souffle de vie. Elle n’était pas allée regarder plus loin, la grenouille. Mais un simple sentiment lui avait insufflé.  Mais plus elle parle, plus elle nie et se noie dans ses propres contradictions. Quelle dame digne de son rang aurait agi comme elle l’a fait, se mettant partiellement en danger. Quelle femme sensée, qu’elle soit mariée ou non, irait courir après un pirate. Une hérésie, brutale. Un poison. Son âme est close, ses yeux grands ouverts. Elle avance à pas légers, silencieux, arrêtant le temps lui-même dans ses mouvements gracieux. De ses pupilles glacées, elle le dévisage, comme elle se méfierait d’un animal fabuleux avec qui elle serait enfermée en cage. Il était bien trop tard pour faire un pas en arrière, alors que tout la poussait en avant. Jamais depuis sa venue, elle ne s’était sentie aussi vivante. « La magie ne peut être vaincue que par la magie - d'un baiser parfois, ou de l'amour. Mais la malédiction que je traîne ne sera brisée que par la sorcière qui l'a lancé j'en ai peur. On parle aussi de - » L’amour ? Quel amour avait-t-elle reçu lorsque le feu s’était lentement glissé sous sa peau, carbonisant sa chair, inhumant ce qui lui restait d’âme. Quel amour avait-elle reçu de son seigneur si ce n’était sa cruelle chaleur. Elle ignorait tout, tout de la magie. Mais sa malédiction à elle, ce n’était que par la violence d’une envie meurtrière qu’elle s’était brisée. Ses doigts sont restés sur la poignée plus longtemps qu’elle ne le voulait, crispés, étreignant ce qui est à sa portée. Ils glissent lentement alors qu’elle ne peut dissimuler une grimace tirée en entendant ce simple mot. L’amour. « Il y aurait une île qui ne serait qu'une jungle fantastique, gigantesque. Les créatures là-bas seraient géantes, et ses dangers multiples. Pourtant, en son écrin de flore hostile se cacherait la réponse à n'importe quel sortilège, malédiction. Un joyau, peut-être, ou une relique magique ... Cette île n'est sur aucune carte, et je ne saurai dire si il s'agit de légendes de pêcheurs ou d'un fait réel. » Elle remarque le désarroi dans ces paroles qu’il a lui-même du mal à croire, le capitaine déchu derrière son bureau, caché du reste du monde. Elle comprend plus qu’elle ne voudrait ce mal qui l’habite, mais regarde, impuissante, comme évaporée par ses propres tourments. La peau d’émeraude s’avance doucement, incertaine, telle une sotte cherchant à apprivoiser la bête. « Elle est sûrement quelque part, ne cessez pas d’y croire. » Elle entend les chuchotements, les murmures dans le ventre quand elle le touche, frôle sa paume de main agitée, le regarde simplement. Elle laisse un court instant échouer ses sentiments entre deux rives, devenus échafaudages croulant. « Vous avez dit ... Avoir brisé des fers. Dites m'en plus - avez-vous ... été faites esclave ? » Les doigts qui s’éloignent, rompent le lien. Un soupir qui s’échappe. Jamais elle n’avait laissé quelqu’un en savoir autant sur elle, par crainte, peur glissante que la sorcière la retrouve. Les entrailles qui se nouent, les veines qui s’effritent. Sa main se porte à son pendentif, et elle en recouvre la balle d’or. « Lorsque j’étais enfant, une sorcière ayant échappé à la purge du nord m’a faite prisonnière. Durant quelques jours je l’ai servie, j’ai comblé ses moindres désirs. Puis j’ai eu le malheur de la contrarier, et je me suis enfuie. » Ses doigts lâchent leur emprise sur la balle et se glissent sous sa robe de mousseline, contre son épaule. Une inspiration, saccadée, tandis qu’elle tourne ses hanches pour lui présenter son dos. Un instant, prête à lui dévoiler cette omoplate reflétant encore la marque de la peau d’émeraude, brûlée, brisée. Mais un bruit sourd l’en empêche, quand la porte de la cale s’ouvre à grand coup. La grenouille sursaute tout en se redressant. Elle récupère sa capeline en hâte et se couvre toute entière, les pupilles rivées sur l’homme ayant fait son entrée. Lentement, prenant toute précaution, ses pas reculent un à un jusqu’à ce qu’elle contourne l’immense table de bois, attrapant derrière son passage une dague posée là même qu’elle cache dans son drapé. Elle ne s’arrête que lorsqu’elle se retrouve derrière le fauteuil du capitaine, préférant la bête à l’inconnu. Dissimulée dans l’ombre.
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MessageSujet: Re: (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries   (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries EmptyVen 3 Juil - 1:35


   
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Ceux qui pensent que les femmes ne sont que des créatures dociles à domestiquer ne sont que des idiots, à mon sens. Si je n'avais jamais été pour ce genre de pensée, en envoyant Moiga, cela prenait une force de loi à mon esprit. Je ne pouvais réaliser l'ampleur des émotions qu'un seul de mes mots, amour, avait déclenché. Je devinais que mes propos décousus provoquaient quelque chose chez Moiga, sans mettre le doigt dessus. Je ne croyais en rien d'autre qu'en moi-même, j'avais appris cela de l'esclavagisme. Quiconque se fait votre sauveur n'est qu'un rapace de plus pour vous picorer le crâne. La liberté se conquérait comme un terrain ennemi. Parfois, l'on mourrait en se battant. La vie était ainsi faite, et il était aussi juste de combattre pour un idéal que pour un pays ou pour une personne. Mais devoir mener une bataille pour une quête dont je n'étais même pas sûre qu'elle menât à un objectif tangible ... Cela était parfois au-dessus de mes forces. Seul Merle et moi-même avions à y gagner. Mes hommes mourraient. Eux qui me faisaient confiance et en qui je savais porter une loyauté insoumise. Ils m'auraient attendus dix ans s'il l'avait fallu. Tout à mes réflexions, mes doigts continuaient de se mouvoir sur le bois en formant une mélodie impatiente, forcenée. Une harmonie que brisa l'étreinte fragile des doigts de Moiga. Je levais le regard vers elle, surpris par son contact, volontaire. « Elle est sûrement quelque part, ne cessez pas d’y croire. » Si cela n'apportait aucun élément concret, aucune piste moins volatile, il y eut comme quelque chose d'apaisé en moi. Comme un animal qu'on caresse, qu'on cajole, qu'on calme à demi-mots, mots doux, douceur du ton.  Mais mon interrogation la fait fuir. J'ai un mouvement pour la retenir, puis me sentant ridicule, je rétracte mon bras tendu vers elle, les doigts immobiles dans l'air, une seconde, un instant, dans une espèce de désespoir chancelant.

C'est quelque chose qui vient du plus profond de l'âme. Une question indiscrète, oui. Mais, bizarrement, si nous voilons encore certaines choses, caprices de l'esprit, il est venu un temps où notre curiosité mutuelle doit être nourrie. « Lorsque j’étais enfant, une sorcière ayant échappé à la purge du nord m’a faite prisonnière. Durant quelques jours je l’ai servie, j’ai comblé ses moindres désirs. Puis j’ai eu le malheur de la contrarier, et je me suis enfuie. » J'écoute, avec la même concentration et la même douce entente qu'elle m'a offerte tout à l'heure. Je l'observe, le regard cillant à peine. Absorbé par son histoire, par l'imagination qui carbure, galope. Je ne peux concevoir cette femme captive d'une sorcière, et pourtant jamais je ne croirais qu'elle me ment. Comme un contrat entre nous. Un serment qui n'a pas besoin de mot, aucune nécessité à l'expliciter. On ne calomnie pas. On joue, certes, mais pas de tromperies. C'est idiot - ma vie se résume aux fourberies et aux mots manipulés. Mais pas là. Unique. Je guette ses gestes. Interdit. Attraction pour chacun de ses mouvements. Penchant des impulsions féminines. Ses hanche, sa taille, son dos, son cou. Sa nuque aux longs cheveux. Sa silhouette toute entière. Le palpitant qui s'agite, soudain. Le coup sourd d'une porte qu'on ouvre, d'une cale qu'on dégage. Merle.

Moiga a vite fait de trouver abri derrière l'imposant siège qui me tient lieu de fauteuil. Je lui jette un dernier coup d'oeil, mi-amusé mi-déçu de ne pas voir vu ce qu'elle voulait me montrer, quoi que cela soit. Je me redresse, sans perdre mon calme. Elle ne craint rien, mais mieux vaut effectivement que mon second et mes hommes ne la voient pas. Non pas qu'elle doive craindre pour sa sécurité. C'est une espèce de jalousie possessive - comme un trésor que je désirerais garder pour moi. Brouhaha qui pénètre, mais seule une silhouette familière descend, puis se fige à la dernière marche. Le regard de mon homme de bois préféré se plisse. « Tes fers ne sont plus ce qu'ils étaient. Me voilà libéré de mon étreinte nocturne et j- » « Forme tigre ou humaine ? » Je grimace. « Humaine. Les cargaisons ? » Merle sent que quelque chose cloche. Il s'approche et je lui fais signe de s'arrêter. J'hésite - si il y a un homme à qui je fais autant confiance qu'à moi, c'est à mon second. Mais même lui, je n'ai pas envie qu'il voit Moiga. Il se fige encore, l'air soupçonneux. « Les revendeurs ont fait des complications, avec nos hommes, mais on a finalement réuni les soieries et les pierres précieuses. De quoi nous assurer un petit pactole dans le Sud. Qu'est-ce que tu me caches, Sherkan ? Je te connais assez pour deviner que quelque chose cl- » « Allons, tu ne me fais pas confiance ? » Coup de bluff, coup d'oeil amusé. Sourire de chat. « Pas sur ce coup là, vieux frère. Tu n'as pas ramené une prostitué au moins ? Ca t'était passé. Cela faisait longtemps que tu n'avais pas partagé la couche d'une femme ! Pour un séducteur comme toi, te sevrer ainsi de la peau des demoi- » Je l'interrompt d'un grognement qui ressemble à une toux. « Nul besoin d'étaler ainsi tes connaissances à ce sujet, Merle » je grommelle, les joues soudain rubicondes. Je prie tous les dieux qui m'entendent pour que Moiga n'ait pas entendu, mais bien sûr, juste derrière moi, elle ne doit pas en manquer une miette. Je grimace encore. « Enfile une chemise et viens nous rejoindre pour charger la cargaison quand tu es prêt. Nos voiles n- » Je l'interromps encore. « On va faire un détour. Un navire chasseur nous poursuit. Ne pose pas de question. Je le sais. S'il te plaît, presse nos hommes. Je dois calculer de nouvelles coordonnées. Mais ... Avant de quitter le port, préviens-moi. Je dois faire quelque chose sur le quai, avant. »

Devant mes ordres quelques peu mystérieux, Merle hausse les épaules et obéit. Il sort enfin et j'émets un nouveau grognement. « Voici donc mon quartier-maître. Merle. Il a compris que je souhaitais être seul. Il se doute de quelque chose, mais je ne le lui expliquerais guère. Pour le moment ils vont charger les cargaisons dans la cale. D'ici quelques dizaines de minutes, ils vont rattacher le tout de façon ordonnée. Les autres iront chercher leur verre de rhum. Seul Merle risquera de vous voir, mais je détournerais son attention. » J'ai pris une chemise de coton et l'enfile sans attendre. Mon coeur bat la chamade en imaginant ce qui suivra, en mer. « Et vous, cela ira ? Aurez-vous la capacité de reprendre le portail avant de venir ? Oh, une dernière chose. » Je me tourne vers elle, curieux. J'ai enfilé un ceinturon et une épaulière de cuir. Mon allure est à présent plus guerrière que nue. Je lui jette un coup d'oeil, à ma sauveuse. « Vous vouliez me montrer quelque chose ? » La voix prise d'un désir manifeste. Au-delà de la curiosité. Le regard qui s'ancre de nouvelles lueurs. Une invitation. Dites-moi ce que vous voulez, et je vous l'offrirais. Elle porte mon collier. L'argent sur sa peau avoisine la balle d'or. Je porte mon regard à son épaule. « Vous avez été prisonnière d'une sorcière. Mais vous êtes en vie. » Une constatation. Une voix neutre, qui cache une espèce de colère avivée d'injustice. « Comment avez-vous vaincu cette sorcière ? » Je ne sais rien. Pas encore. Bientôt peut-être. Si elle le désire. Le bateau est rempli à présent de rires et de cris, mais ma cabine est fermée. Personne n'entrera. Juste elle et moi. Pour quelques minutes encore. Des instants volés.

 
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MessageSujet: Re: (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries   (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries EmptyVen 3 Juil - 23:40






Sherkan & Moiga


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Démunie. Dépouillée, le nu le plus entier, sans plus aucune illusion, désenchantée. Pendant un instant qui lui parut le plus long, une éternité, elle avait laissé glisser le rideau, elle avait fait tomber le masque. Quel était donc ce sortilège, cet envoûtement qui la poussait en avant, la prolongeait dans une longue suite de secrets et de désirs brûlants. Fils du désert. Restait-il encore une once de magie gisant sur cette peau de miel, une trace si infime soit-elle d’un maléfice cuisant ? Elle ne pouvait pas même mettre de mots sur cette frénésie qui l’habitait, et il paraissait bien plus simple de se jeter volontiers tête la première dans le ravin grouillant, aveuglée d’une exaltation calcinante. Dans la gueule, aux crocs ardents. Le Capitaine au Tigre. Bien des choses en surface, à l’écume des vagues; un séducteur, un combattant, un forban. Insaisissable, animal indomptable et sauvage. Mais tellement plus en dedans, sous la frêle fourrure des sentiments qu’il se complait à garder. Ses pupilles ne désiraient plus que creuser et sa silhouette, s’y emmitoufler. Elle ne pouvait consciemment ignorer ses gestes, ses approches si tendres. La mécanique se mettant doucement en route, le palpitant se cassant contre les rouages poussiéreux. Mais il y avait tellement de raisons pour se rétracter, défier les louanges et rester muet. Peut-être pas assez. Elle se confie, et pose entre ses mains sa pathétique vie. Elle omet les détails, les heures écoulées à se lamenter, défiant la mort de venir la chercher. Elle fait silence sur la barbarie, les années passées à galoper pour sauver sa peau, l’errance et l’abandon. Peut-être parce qu’elle n’avait jusqu’alors jamais eu à en parler, peut-être parce qu’elle ne peut se résoudre aux gémissements de douleur face à un homme qui n’en est pas libéré. Mais elle n’a plus à se cacher, la grenouille. Rien de plus qu’un monceau de chair brûlé, une surface encore teintée d’émeraude. Pourtant, le tigre n’a pas l’occasion de la découvrir encore. Moiga se réfugie derrière le fauteuil du capitaine qui se lève derechef. Il parait calme alors que des bruits sourds se font entendre déjà, des pas lourds qui s’activent sur le pont, des voix rauques qui hurlent et hoquettent un brin. La grenouille resserre son étreinte sur la dague volée, dissimulée derrière sa capeline, comme pour se rassurer de ce silence pensant. Du coin de l’oeil, elle reconnait cette jambe faite de bois, un de ses hommes est là. L’aurait-il reconnue ? « Tes fers ne sont plus ce qu'ils étaient. Me voilà libéré de mon étreinte nocturne et j- » « Forme tigre ou humaine ? » « Humaine. Les cargaisons ? » De nouveau ce silence, lourd de soupçons. Le coeur qui bat, manque de s’étreindre dans un fléchissement. Elle reste pourtant le plus impassible possible, son corps ne se mouvant sous aucun prétexte, se voulant fantôme, mirage. La respiration inaudible. Elle n’expire que quand la discussion reprend, mais celle ci se ponctuant bientôt d’un autre tournent. « Allons, tu ne me fais pas confiance ? » « Pas sur ce coup là, vieux frère. Tu n'as pas ramené une prostitué au moins ? Ca t'était passé. Cela faisait longtemps que tu n'avais pas partagé la couche d'une femme ! Pour un séducteur comme toi, te sevrer ainsi de la peau des demoi- » Elle ne peut manquer un sursaut, le coeur livide, tandis que Sherkan râle une fausse toux, grognement explicite. Déçue peut-être, mais pas surprise. Elle déglutit. « Nul besoin d'étaler ainsi tes connaissances à ce sujet, Merle. » Un sourire en coin, discret, muet. Avait-il si peur de ce qu’elle pouvait penser ? La grenouille se plaisait à songer qu’il y portait un quelque intérêt. Elle entend le bois craquer, sent la présence s’en aller. D’un geste vif mais non agressif, elle se décape, l’oeil aux aguets, le sourire dessiné. « Il est vrai que sous cet angle, tout portait à croire que vous étiez très occupé. » glisse-t-elle d’un ton amusé en accentuant le regard sur ton torse dégagé, parfaitement tracé. « Voici donc mon quartier-maître. Merle. Il a compris que je souhaitais être seul. Il se doute de quelque chose, mais je ne le lui expliquerais guère. Pour le moment ils vont charger les cargaisons dans la cale. D'ici quelques dizaines de minutes, ils vont rattacher le tout de façon ordonnée. Les autres iront chercher leur verre de rhum. Seul Merle risquera de vous voir, mais je détournerais son attention. » Elle détourne le regard quand il se vêt d’une chemise, quand bien même elle avait déjà tout vu, profitant de cet instant pour vérifier son pot de cendres. « Et vous, cela ira ? Aurez-vous la capacité de reprendre le portail avant de venir ? Oh, une dernière chose. Vous vouliez me montrer quelque chose ? » Le palpitant qui tambourine, éclôt à la dernière minute. « Vous avez été prisonnière d’une sorcière. Mais vous êtes en vie. Comment avez-vous vaincu cette sorcière ? » La peau d’émeraude se mord la lèvre inférieure, lance un regard vers la porte fermée de la cale. Elle pourrait s’enfuir, mais ne voudrait se risquer à briser déjà ce qui était tout juste en train de se tisser. Ses rétines se mêlent à celles du capitaine, mémorise chacun de ses traits avant d’inhaler les odeurs qu’il dégage. Le rhum, le bois, le fauve. Aura-t-il encore envie de la revoir, après cela ? « Elle n’est pas vaincue, pas que je sache du moins. Je ne sais ce qu’elle est devenue depuis toutes ces années. Mais j’espère que je n’aurais jamais à revoir son visage. » Sa main présente la balle d’or. « Je devais récupérer cette balle au fond d’un puits. Je n’ai pas pu, je n’étais qu’une enfant. Elle m’a maudit, transformée en une bête immonde pour me dévorer, et sous ma forme animale j’ai récupéré le bijou avant de m’échapper. » Elle souffle, puis puise dans ses réserves d’oxygène. Elle mime les mêmes gestes, se retourne et fait glisser la large bretelle de mousseline. Les paupières fermées, se laissant sombrer dans les ténèbres, le coeur libéré mais blessé, attendant sa sentence. « Voilà ce qui me reste du maléfice… une empreinte répugnante de grenouille. »
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MessageSujet: Re: (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries   (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries EmptySam 4 Juil - 0:25


   
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L'entretien a beau être bref avec l'homme de bois, il me semble durer des heures. Quand enfin je vois disparaître la silhouette familière et masculine, quand la trappe se referme dans un bruit sourd, une autre carrure apparaît, plus féminine, moins habituelle mais bien plus agréable à l'oeil. « Il est vrai que sous cet angle, tout portait à croire que vous étiez très occupé. » Le sourire qui effleure ses lèvres ne me cache rien - elle a tout entendu, et sa moquerie, bien que gentille, a le don d'égratigner mon égo. Allez savoir pourquoi - peut-être parce que mon idiot de second, ce crétin qui ne sait pas mentir, vient d'obligeamment exprimer à voix haute combien le fait d'avoir été maudit à réduit à néant mes séductions. Depuis combien de temps n'ai-je touché une femme ? Trop longtemps. Les désirs exacerbés. Le regard qui caresse Moiga, comme une créature divine et merveilleuse. « Merle a toujours eu la mauvaise habitude de trop parler » je grogne en répondant au sourire de la brune par un rictus mi-amusé mi-agacé. Mais nous ne sommes pas là pour débattre de ma vie amoureuse, et les sujets abordés sont d'autant plus importants qu'ils me tiennent à coeur.

Mes questions me semblent indiscrètes, à mes propres oreilles. A dire vrai, je n'ai pas vraiment peur pour elle - je la raccompagnerais jusqu'à ce qu'elle utilise un portail. Je veux la voir rentrer chez elle, et non pas l'abandonner sur un quai comme un goujat. Autrefois, peut-être, il y a des années, je ne me serai pas soucié d'elle. Fût un temps où les femmes n'étaient que des objets ou des parures, des trophées. Mais cet ancien Sherkan, le rude et cruel, qui prenait comme il tuait, avait disparu le soir où la lune m'avait fait son enfant. Ce jour où la sorcière m'avait maudit. Peut-être qu'en devenant bête la nuit, l'homme que j'étais avait pu évoluer vers quelque chose de moins ... cruel. Suppositions. Spéculations de bar. Oeuvres pensives créées par l'alcool, le rhum et le tabac, par la fatigue et la lassitude. Des explications creuses, qui n'ont de véracité que ce que je désire leur donner. « Elle n’est pas vaincue, pas que je sache du moins. Je ne sais ce qu’elle est devenue depuis toutes ces années. Mais j’espère que je n’aurais jamais à revoir son visage. » Par Mêht, comme je la comprend. Pourtant, les traits de ma sorcière, j'adorerais les observer de nouveau, afin d'y voir la lueur de la souffrance. Vengeance. Une émotion pure et cinglante, qui fait battre le coeur et mord le corps. Je sais que, si je l'avais devant moi, je ne saurais être aussi incontrôlable que je le désirerai. Dans le fond, peut-être a t-elle eu raison ... Mais cette magie me pèse et m'emprisonne. Et si il le faut, je n'hésiterais pas - je serai prêt à tout afin de m'en libérer. La balle d'or attire mon regard et j'y attache mes prunelles. « Je devais récupérer cette balle au fond d’un puits. Je n’ai pas pu, je n’étais qu’une enfant. Elle m’a maudit, transformée en une bête immonde pour me dévorer, et sous ma forme animale j’ai récupéré le bijou avant de m’échapper. » Je n'ai aucun mal à retracer dans mon imagination les déboires qu'elle a dû vivre. Elle aussi, enfant, a subi des fers. Ceux-là étaient sûrement plus cruels encore que ceux que j'ai connu. Les mots forme animale captent toute mon attention. Non, pas vous, impossible, ai-je envie de dire, de prononcer, de murmurer, mais les mots meurent dans ma gorge, comme ma raison alors qu'elle se tourne et me présente son dos. Cette fois, alors qu'elle met à nue son épaule, nul homme ne nous interrompt. Et, sous les lumières chiches du jour et des bougies allumées, je peux remarquer la trace de peau verte, amphibie de toute évidence. « Voilà ce qui me reste du maléfice… une empreinte répugnante de grenouille. » La voix a un soupçon de tension. Je reste interdit - elle connaît ce que je vis. La seule personne maudit que j'avais jamais rencontré était Merle. Mais il ne pouvait totalement comprendre, même si il avait été esclave aussi, combien passer d'une forme humaine à animale pouvait être douloureux, étourdissant. Cruel.

Je m'approche à pas doux, feutrés, discrets. Je ne fais aucun bruit, jusqu'à me trouver juste derrière elle. Mes yeux ne lâchent pas cette empreinte dans la chair de Moiga. Je ne dis rien, mes neurones s'agitent. Puis, avec une délicatesse empreinte de gentillesse, je caresse du bout des doigts la peau d'émeraude. « Je ne vois pas ce qu'il y a de répugnant à porter ce stigmate. Il fait partie de vous, comme une cicatrice. Ce n'est pas plus dégoûtant qu'une fourrure de tigre. » Peut-être mes mots ont-ils l'apparence d'une vaine politesse. Je dois lui sembler condescendant, sûrement. Je me penche, subtilement, et dépose le plus léger des baisers sur ce carré de peau couleur d'herbe verte. Je me redresse et remet la bretelle sur l'épaule. Non pas pour cacher l'horreur, car cela n'est que dans la tête de Moiga, mais pour éviter qu'elle ne se sente à découvert. « Deux êtres changés par un maléfice. Une grenouille et un tigre. Il y aurait de quoi écrire de fabuleuses histoires, vous ne croyez pas ? » J'ai un petit sourire, et attrapant sa taille, je la fais tourner pour que nos regards se trouvent. Il n'y a aucune moquerie ni aucune envie de la séduire. Ou peut-être profondément, quelque part, sous-jacent. Mais avant tout, je veux lui faire comprendre une chose. « Ne soyez pas trop dure envers vous-même. Il n'y a rien de plus contre-productif. Le premier homme qui détournera le regard de vous à cause de ce que vous êtes, de ce que vous avez été, sera un filou et un rustre. Vous avez vécu plus d'aventures que bien des femmes. Peut-être vous ai-je mal jugé ... » je murmure, avant de reprendre, l'oeil admiratif, « Peut-être êtes vous déjà l'une de ces femmes fortes, conquérantes du monde. » Petit sourire amusé. Je réalise que les minutes passent, et je me détache d'elle. Je m'étire, comme un chat, afin de faire passer cette sensation étrange sur ma peau. Cette émotion partagée, qui a frémit quand je l'ai touchée - non pas sa peau d'émeraude, non, mais elle toute entière. Peu importe qu'elle fût femme ou grenouille, ou un peu des deux. Elle continue de m'intriguer et de faire pulser dans ma poitrine l'organe vital.

« Il vous faut partir. Suivez-moi. Pas un bruit. Sortez quand je vous fais signe. » Je hoche la tête, comme pour la rassurer, lui faire comprendre que tout ira bien. J'ouvre la cale et apparaît sur le pont. La lumière du petit matin m'accueille et auréole les environs de son or en rayons, comme du miel. Merle est accoudé au bastingage, en train de mâchonner un bâton de réglisse. Je m'approche de lui et m'étire encore. « Mon bon Merle. Fais-moi plaisir et va vérifier l'arrimage dans la cale. » « Il se passe déjà très bien. Tu comptes faire sortir la fille de ta cabine discrètement, Kan ? » Sourire. « Peut-être bien. Mais je ne voudrais pas te faire mourir de jalousie. Mon ami. S'il te plaît dét- » « Je te laisse seul. Mais tu as intérêt à me raconter plus tard. » L'homme de bois disparaît dans la second cale où mes hommes sont en train d'attacher les cargaisons. Je fais un signe vers Moiga. « Je vais vous accompagner jusqu'à l'endroit où vous avez pris votre portail. Je vous suis. » Déjà, l'aube est là. La nuit est passée, et j'ai l'impression de vivre un rêve. Il y a à peine deux heures, j'étais encore tigre, et cette femme n'était qu'un détail dans ma mémoire, gravé à l'encre sous mes paupières. Et la voilà, fière et plus volontaire que jamais, héroïne et sauveuse. « Vous avez dit, la dernière fois, que les femmes fortes devaient avoir passé un pacte avec les Dieux. Vous vous fourvoyez - vous êtes l'une d'elle, et le seul serment que vous avez désiré passer est avec vous même. Vous feriez une pirate exemplaire, ou du moins ... » une compagne de pirate, Sherkan ? Allais-je réellement dire cela ? J'émets un petit grognement et je hausse les épaules, sans finir ma phrase, je me contente de la suivre sur les quais. La Mandragore m'attendra, cent ans si il le faut. Je me mouve à côté de Moiga, protecteur et présent, d'une présence féline et animale, le regard aux aguets.

 
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MessageSujet: Re: (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries   (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries EmptyDim 5 Juil - 15:56






Sherkan & Moiga


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La dernière fois qu’elle avait dévoilé cette marque remontait à bien des années, lorsqu’elle s’était toute entière abandonnée. Figure de purification, d’abondance ou encore de renaissance, la trace du batracien ne représentait pour elle que médisance. L’empreinte amère d’une sorcière avide de pouvoir, affamée de cruauté. Chimère du corps, mirage de l’esprit. Elle est prise de frissons, saisie par le frôlement de leurs surfaces de peau. Elle évanouit un sursaut, à sa caresse qui l’emplie d’une aura glaciale. « Je ne vois pas ce qu'il y a de répugnant à porter ce stigmate. Il fait partie de vous, comme une cicatrice. Ce n'est pas plus dégoûtant qu'une fourrure de tigre. » Les paupières qui se découvrent, les pupilles qui se dilatent. Ses lèvres se mouent dans une grimace tirée qu’elle s’empresse de mordre. Elle ralentit la cadence de ses inspirations, comme pour bercer et apaiser son coeur dans la course effrénée qu’il mène. Elle ne dit mot, préférant le silence au lever de rideau. Nul besoin de montrer plus de faiblesses. Mais quand elle sent le doux baiser du capitaine, ses lèvres effleurer et ses poils drus picorer sa peau, le palpitant s’arrête. Moiga ne cille pas. Ses rétines sages sont voilées, ses bras noués devant sa poitrine. Il la rhabille délicatement, alors qu’elle compte chacun de ses battements. « Deux êtres changés par un maléfice. Une grenouille et un tigre. Il y aurait de quoi écrire de fabuleuses histoires, vous ne croyez pas ? » Elle lâche un rire le menton baissé, presque inaudible, léger et tout aussi nerveux. Mais le sentiment est sincère. La peau d’émeraude se laisse porter par l’emprise du tigre, tournant au rythme des doigts indiscrets pianotant sur sa taille. Une telle proximité l’embarrasse plus que de raison, n’étant pourtant pas une demoiselle des plus réservées. Peut-être est-ce son regard perçant, semblant pénétrer son âme, ou ses mots, qui sonnent comme des caresses. Peut-être est-ce le danger, le jeu, l’illusion menée entre l’homme et la bête. « Ne soyez pas trop dure envers vous-même. Il n'y a rien de plus contre-productif. Le premier homme qui détournera le regard de vous à cause de ce que vous êtes, de ce que vous avez été, sera un filou et un rustre. Vous avez vécu plus d'aventures que bien des femmes. Peut-être vous ai-je mal jugé ... Peut-être êtes vous déjà l'une de ces femmes fortes, conquérantes du monde. » Elle le dévore des yeux, la main portée à ses colliers, frôlant sa clavicule. Elle aimerait croire en ses paroles qui sonnent justes et tentantes, mais il n’en est rien. Les mots résonnent et font écho. L’homme en question, le premier à avoir détourné le regard pour mieux frapper, elle l’avait épousé. Elle n’était ni forte ni conquérante. Elle était lâche et se cachait derrière les silhouettes les plus imposantes. Elle était arriviste et s’octroyait des richesses et un rang qu’elle ne méritait pas. Elle était faible. Sherkan se berçait d’illusions desquelles elle ne le réveillerait pas pourtant. Plus que par vanité, elle souhaitait surtout qu’il ne la lâche pas des yeux. « Il vous faut partir. Suivez-moi. Pas un bruit. Sortez quand je vous fais signe. » Le coeur qui tambourine de nouveau, la peur, l’excitation. Elle imite son hochement de tête en se couvrant le visage de sa cape et reste à l’embrasure de la cale, l’oreille attentive aux environs. Elle ne perd rien de la conversation entre le capitaine et son second, puis se met en route dès lors qu’il lui fait signe. « Je vais vous accompagner jusqu'à l'endroit où vous avez pris votre portail. Je vous suis. » Moiga guide la marche, se dirige sans broncher vers la ville d’où elle était arrivée. Elle ne craint plus, étrangement, désormais qu’elle sent sa présence à ses côtés. « Vous avez dit, la dernière fois, que les femmes fortes devaient avoir passé un pacte avec les Dieux. Vous vous fourvoyez - vous êtes l'une d'elle, et le seul serment que vous avez désiré passer est avec vous même. Vous feriez une pirate exemplaire, ou du moins ... » Il laisse en suspend un silence, dessinant un fin sourire dissimulé derrière la capeline de Moiga. Bien qu’elle agrémentait les refus, elle aimait entendre qu’il ne comptait pas en rester là, s’accrochant éperdument à elle comme à une ancre glissant dans les tréfonds. « Mes capacités à tisser ne me seraient pas d’une grande utilité et malheureusement, je suis plus fidèle envers mon seigneur qu’envers moi-même. » Ils continuent leur marche, côté à côté, comme deux étrangers complices. Elle mémorise un instant les couplets musicaux, les rires gras sentant le rhum, les sons de violence, de gifles perdues et de hurlements amusés. Arrivée derrière une bâtisse, elle remarque les cendres éparpillées encore au sol. « Ne faites rien d’idiot Sherkan, partez vite je vous en prie, que ma venue ne soit pas vaine. » La peau d’émeraude découvre son visage, fait glisser les dernières cendres qu’il lui reste. Le miroir apparait, mais son coeur manque un bond. Le reflet la renvoie ici même. L’a-t-il remarqué ? Elle clôt les paupières un instant, se concentre sur Goldenbridge. Quand elle les rouvre, la cité d’or la contemple. « Je crois que ceci vous appartient, j’ai presque failli partir avec. » glisse-t-elle d’un sourire, lui tendant la dague qu’elle avait dérobée sur son bureau. « Apprenez moi à me battre, quand nous nous reverrons. Je ne serai peut-être jamais ce que vous espérez de moi, mais je dois savoir me défendre, puisque vous ne serez pas toujours là. » Ses doigts blancs frôlent sa chemise, les yeux glissants délicatement, remontant vers son regard, adieu silencieux.
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MessageSujet: Re: (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries   (MOIGA & SHERKAN) Remember me for centuries EmptyLun 6 Juil - 1:02


   
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(fall out boy) ▽ Some legends untold some turn to dust or to gold but you will remember me, remember me for centuries


Je n'ai rien remarqué - ou peut-être ai-je désiré fermer les yeux sur les émotions qui poissaient nos deux êtres. Des sentiments trop diffus pour vouloir mettre un nom sur eux. J'avais beau être courageux, je ne voulais en aucun cas découvrir les origines de ces frémissements de l'âme qui prenaient mon coeur. Nos pas résonnent à mes oreilles comme des carillons fantasques, mais nul ne se retourne sur notre passage. Je me contente de sourire, l'air affable, mais l'air vigilant. Le félin aux aguets. Quiconque désirerait la blesser se verrait de suite transpercer par ma rapière, sur laquelle ma main semble flâner sans s'attarder ; les doigts pourtant sont agiles et lestes. Rapidité à tuer. Sans remord ni regret. Surtout pas pour elle. Mais peut-être que ma langue a perdu de sa superbe en offrant à mes sens leur acidité. Peut-être que je m'embourbe dans mes propres paroles. « Mes capacités à tisser ne me seraient pas d’une grande utilité et malheureusement, je suis plus fidèle envers mon seigneur qu’envers moi-même. »  Et envers moi, Milady ? Seriez-vous fidèle ? Mais ils ne franchissent pas mes lèvres, ces mots indécents, presque rebelles. Il n'est même pas correct de les songer - mais est-ce qu'un pirate a au moins une once de décence ? Sûrement pas moi. Politesse oui, mais de cette délicatesse mesurée, jamais. Alors je m'octroie, je m'offre cette pensée terrible - à moi, seriez-vous fidèle, Moiga ?

L'endroit où nous nous trouvons semble désert. Des cendres grisâtres jonchent le sol. L'endroit de l'ancien portail. Je frémis de tout mon être - peut-être le désir de sentir la magie perdue. De sentir celle qui viendra. L'intérêt avant la peur. Le désir avant la crainte. « Ne faites rien d’idiot Sherkan, partez vite je vous en prie, que ma venue ne soit pas vaine. » « Ne vous en faites pas, Milady, je ne vais pas m'éterniser. Mais je ne désire aucunement que votre venue soit votre perte. Ni vous ni moi ne mourrons encore aujourd'hui. » Un large sourire fanfaron. Comme si je défiais la mort elle-même de venir me trouver. Le feu de Mêht coule dans mes veines. L'homme du désert. Je suis la flamme qui vit sur l'eau, paradoxe ambulant, au masque aqueux d'homme, au tigre interne de braises. Moiga jette les cendres et je jette des regards alentours. Je crois apercevoir quelque chose - Turtleroc ? Mais non, l'image se floute pour devenir une cité où je n'ai jamais mis les pieds. « Je crois que ceci vous appartient, j’ai presque failli partir avec. » Je baisse ma vue sur l'arme, et je hausse les sourcils. Cela est à moi, oui. Que fait-elle avec ma dague ? Je reconnais la courbe douce et sais la lame effilée que le fourreau cache. « Apprenez moi à me battre, quand nous nous reverrons. Je ne serai peut-être jamais ce que vous espérez de moi, mais je dois savoir me défendre, puisque vous ne serez pas toujours là. » Mais je ne prends pas l'arme. Et, délicatement, je referme les doigts de la jeune femme sur la dague. « Si vous désirez vraiment apprendre à vous battre ... Portez cette dague. Vous en aurez sûrement plus besoin que moi - même si je suis loin d'espérer cela. Ce que vous dérobez, vous le garder. Un butin, un souvenir, appelez cela comme vous voulez. » Ma main frôle la sienne. Je réduis à peau de chagrin la distance qui nous sépare. J'embrasse son front, presque maladroitement. « Portez-vous bien, ma Dame. » Je fais volte-face après un dernier regard. Je m'éloigne de quelques pas, émerge dans la ruelle. Et quand je jette un dernier regard en arrière, elle a disparu, le portail avec elle. Je reste deux secondes interdit, avec son parfum dans le nez. Puis je cours. Nous avons un chasseur a semer, et Merle sera ravi d'apprendre combien son capitaine a trouvé un intérêt dans autre chose que le troussage de jupons.

 
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