Une semaine que la menace se dresse au ciel. Wolfram sait lorsqu’elle va apparaître. Le comportement qui change. Agressif, et les chevaux qui refusent d’approcher, la crainte pour l’enragé. Sons et odeurs deviennent plus prenants et c’est la nécessité de s’enfermer, de verrouiller la porte. Aucune visite, personne qui ne vient voir le dangereux en bordure de foret. Une petite qu’il observe, Prio avec qui le comportement frôle l’atrocité. Prio l’enfant ramassée, capturée, adorée. La figure similaire à la petite qu’il a égaré il y a des années. Son erreur. Sa maladie. Il tremble du changement.
« Tu n’ouvres pas la porte… même si tu sais que c’est moi, compris ? Tu verrouilles » Les dernières paroles. Le baiser à la joue et il s’éloigne.
La nuit tiraille la peau, de l’homme qui devient bête pour quelques heures. Les tissus qui tombent au sol, et la fourrure revêt celui qui prétend à l’humanité, la gueule qui tire sur la mâchoire et les crocs surgissent, déchirent le visage. Quatre pattes, animal furieux qui bondit et s’échappe de la tanière. Il court à ne plus savoir, à oublier ce qu’il était avant tout ça. La lune comme compagnon pour ses appétits nocturnes, des vagabonds qu’il traque. Pas d’animaux, jamais. Mais eux, les odeurs alléchantes, et parfois quelques enfants abandonnés par leurs parents, ces petits criant
« au loup, au loup, aidez-nous » mais personne n’entend les supplications et tonnent les fracas d’os entre les crocs meurtriers. Un festin pour ce soir, de deux petits qu’il déchiquète et laisse une carcasse pour les charognards. Rien pour les reconnaître. L’identité prisonnière. Le Loup vogue à d’autres jeux, aux promenades, aux conversations avec ses autres camarades. Animal joueur aux babines sanglantes. Il taquine un cerf, lorsque l’écho des tambours meurtriers l’oblige à relever les oreilles, à l’attention des pas qui courent en leur direction, en SA direction. Il cavale pour sa survie, il connaît les chasseurs, à reconnu leur hargne qui suinte. S’échapper, courir toujours plus loin. Mais les pattes se prennent dans un piège, le hurlement de la douleur. Coups de museau pour se défaire, furie des mouvements mais rien n’y fait. Une patte est coincée. L’arracher, se défaire. Il couine du mal qui rogne. La peur qui grouille, animal qui sent venir la mort. La fourrure reste, de la peau qui se déchire sous l’impulsion des gestes. Libre. Il court, patte boiteuse qui ne suit pas le mouvement. Plus vite. Les branches qui déchirent le pelage, d’autres blessures. Le sang se disperse, la trace qu’il laisse pour les chasseurs. Se cacher, trouver et se réfugier. Bestiole crevée qui tombe devant une maison, les griffes contre la porte, l’appel pour de l’aide, le lieu reconnu, la mémoire humaine qui l’a guidé. Hurlement, pour l’appel, pour l’odeur qu’il reconnaît comme n’étant pas un danger. L’aide. La porte s’ouvre et grogne l’animal qui recule, crocs en avant, mais la patte l’empêche de fuir. Une chute.
La naissance des rayons, de l’aube nouvelle qu’il ne voit pas. Le coma de la nuit. Souffle irrégulier pour la course infernale. Les changements qui s’opèrent, la fourrure qui tombe et le corps s’étire, les pattes qui redeviennent bras et jambes, le visage, les modifications et surgit l’homme de l’enveloppe lupine. Les ambres s’agitent dans leur orbite, la vision redevenue celle mauvaise des humains mais les sons et les odeurs sont toujours prenants. Presque mort. La jambe gauche déchirée, les os apparents. Et les côtes, de quelques unes brisées très certainement. Plus rien à sauver. Un bras qu’il tend piteusement en direction de la figure qu’il discerne avec difficulté. L’aide qu’il réclame mais les mots sont cousus dans sa gorge.
« Jo… Jord » Le prénom interdit depuis des années.
« J’suis…. Perdu, je voulais pas… ils… » C’est déjà de trop, la blessure qui l’empêche de raisonner correctement. La confusion avec le passé.
Chasseurs qu’il n’arrive pas à prononcer. Un
aide-moi qu’il refuse. Cadavre.
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